juillet 10, 2025

Eau Vive! Bonbons! Argent!

Hier, nous avons pris la route nationale 8, depuis Morondava et jusqu’à Bekopaka, où se trouvent les Tsingy (des rochers sculptés par l’érosion). Même si à vol d’oiseau, ce n’est pas si loin, nous sommes partis à 5h du matin et nous sommes arrivés à 18h à l’hôtel. En fait, bien qu’elle se nomme « route nationale », elle n’est pas goudronnée, c’est une piste, qui est fermée pendant la saison des pluies. Elle a rouvert il y a peu de temps et est praticable pour l’instant en 4×4. Certains tronçons sont relativement plats, mais la plupart ressemblent à des montagnes russes.

Au cours de la route, nous avons traversé plusieurs villages. En général, des enfants se tiennent au bord de la piste et font coucou avec la main. Nous leur rendons volontiers leur salut, avec le sourire. Nous dépassons aussi des adultes, qui vont aux champs ou transportent divers objets. Ils s’arrêtent souvent pour nous laisser passer, car il y a peu de véhicules qui empruntent la route. Aussi quelques charrettes à zébu, qui se mettent sur le coté plus ou moins facilement,

Lors d’une pause pipi, de nombreux enfants se sont approchés du véhicule en criant: « Eau Vive, Eau Vive! ». L’Eau Vive est une des marques d’eau en bouteille à Madagascar. En fait, ce que les enfants demandent, ce n’est pas de l’eau, mais des bouteilles en PET vide. Nous n’en avions pas (sinon, nous leur en aurions volontiers donné, car nous savons qu’elles seront réutilisées). Nous le leur avons dit. Mais ils ont aperçu des bouteilles en redisant « Eau Vive », mais elles n’étaient pas vides… nous ne voulions donc pas les leur donner. Nous ne leur avons rien donné, malgré leur insistance dérangeante. Diane a un peu joué au foot avec une autre fille et les enfants nous ont regardés avec curiosité.

Plus loin, nous avons à nouveau entendu des « Eau Vive! » en passant avec la voiture, et aussi des « Bonbons! » Pas de Bonjour, ou de Salama (bonjour en malagasy) ou encore Akoriaby (bonjour dans le dialecte régional). Certains ont même demandé « Argent! Donne moi l’argent ». Pour les enfants de ces villages, les vazaha (blancs) qui traversent le village sont seulement des fournisseurs de bonbons, de bouteilles vides et peut-être même d’argent. Probablement que de nombreux touristes avant nous ont eu pitié de ces pauvres petits enfants de brousse et leur ont gentiment offerts quelques bonbons. Mais est-ce vraiment leur rendre service?

C’est sûr qu’en voyant des enfants avec des T-shirt déchirés, trop grand ou trop petit, on peut avoir pitié. La grande sœur qui porte son petit frère. Des petits enfants sans surveillance d’adulte. Pas de jouets, juste un ballon en matériel de récupération. C’est sûr qu’ils n’ont pas le même quotidien que des enfants en Europe, pas autant de possibilités. Mais est-ce qu’un bonbon ou un petit billet va faire la différence? Non, cela crée juste une dépendance, et les enfants n’attendent plus les voitures juste pour leur faire un petit coucou, mais dans l’espoir de recevoir quelque chose.

Quand j’étais enfant, je me souviens qu’on regardait passer un train de montagne en faisant des grands gestes de la main et notre plaisir, c’était que les gens nous renvoient notre salut.

Alors je vais continuer à ne rien donner aux enfants, même s’ils sont mignons. Mais je vais aussi continuer à soutenir des ONG qui œuvrent en faveur des enfants, en faisant fonctionner des écoles de qualité (dans le district de Bemaraha, seul 1/3 des enfants est scolarisé et seul 5% arrivent jusqu’au bac). Et je vais également soutenir des ONG qui proposent d’autres actions permettant aux populations locales de vivre dignement, en renforçant leur pouvoir d’agir, d’élever leurs enfants dans de bonnes conditions.

Et j’espère continuer à voir des enfants me saluer, avec un beau sourire, pas gâché par des bonbons…